| Abstract
| - The debate between reductionism and anti-reductionism, dealing with the ultimate constituents of the world, is one of the fundamental issues in the philosophy of science. However, in biology, reductionism is less of an ontological and more of an epistemological question: it argues that the explanation of biological processes resides in deciphering the genetic code of living entities. This position is still prevalent in cancer biology, which has long been defined as a cellular process where genetic alterations are responsible for aberrant proliferation. While the hypothesis of somatic mutations remains the central theoretical model, a bundle of experimental data reveals how important the disturbances of tissue organisation are in cancer development, leading to a renewal of holistic and organicist approaches. This latter perspective in particular attempts to contextualise and rethink the centrality of the genetic level by proposing a new conception of cancerogenesis as a tissue disease.
- La recherche sur le cancer bénéficie depuis quelques années de la révolution technologique permettant de séquencer les génomes à grande échelle. Les données obtenues confirment l’ampleur de la complexité génétique des cancers, suspectée depuis longtemps déjà. Alors que l’hypothèse de mutations somatiques au niveau cellulaire reste le modèle théorique prépondérant, un faisceau d’arguments expérimentaux révèlent l’importance de perturbations de l’organisation tissulaire dans le développement des cancers, provoquant un renouveau des approches holistes et organicistes. En outre, l’intérêt toujours croissant pour les phénomènes de type épigénétique, qui peuvent entraîner des variations rapides et réversibles en fonction de l’environnement cellulaire, ainsi que le rôle possible de l’expression aléatoire des gènes, obligent à considérer les modèles réductionniste et holiste au vu de cet ensemble de sources de variabilité biologique. L’actualité de ces différentes notions et de ces différents modèles sera discutée dans les articles présentés ici. Après une introduction par Anna Zielinska et Tarik Issad soulignant les enjeux épistémologiques et scientifiques de cette discussion, le texte de Michel Morange (p. 679) rappelle les étapes majeures de l’histoire de la représentation biomédicale du cancer. Le texte d’Éric Solary (p. 683) présente un état des lieux de la recherche actuelle sur le cancer dans le cadre de l’approche réductionniste, alors que celui d’Ana Soto et Carlos Sonnenschein (p. 688) est un plaidoyer pour une théorie organiciste, élaborée face aux échecs des théories réductionnistes. Jean-Pascal Capp (p. 693) met en exergue le rôle des phénomènes aléatoires, et en particulier de l’expression stochastique des gènes, dans le cancer. Enfin, Jean-Jacques Kupiec (p. 699), grâce à qui cette rencontre de personnes et d’idées a pu avoir lieu, a écrit une postface à cet ensemble de textes.
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